Féminisme d’État: Contradiction, récupération, avancée et mise au pas ?

Questionner le féminisme d’état nous interroge d’une part, sur son impact sur le mouvement féministe lui-même, avec sa volonté de cooptation, récupération, déradicalisation et contrôle, et d’autre part et à l’inverse, sur sa capacité d’être la traduction en mesures politiques des revendications issues des luttes féministes par des lois et des moyens financiers. Le féminisme se décline au pluriel, son rapport avec l’Etat également. Au risque de tomber dans la caricature, certains féminismes considèrent tout perdre à transiger avec l’état, alors que d’autres croient que celui-ci peut servir la cause des femmes et pour certains, il est même le seul levier car le « féminisme d’état » serait en soi le seul espace de la cause des femmes. Quelles femmes tirent bénéfice du féminisme d’Etat ? Lesquelles rejette-t-il hors du spectre d’influence de la « cause » des femmes ? Le féminisme et le capitalisme sont-ils compatibles ? Le « féminisme d’état » serait-il un pompier pyromane ? Ennemi ou allié du mouvement des femmes ?

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Démocratie et processus

Les abstentions lors des récentes élections disent combien le système dit de « démocratie représentative » rend insatisfait, pour ne pas dire amer. Or, comme tout grief, la critique même sévère ne conduit pas automatiquement à une solution alternative. On parle beaucoup d’aspiration à la démocratie et la multiplicité des expérimentations, depuis les entreprises mises en coopératives jusqu’aux villages en quête d’une démocratie locale alternative, signale une recherche active. Malheureusement, elles restent enfermées dans de petits cercles, où l’on est sûr de ne pas se laisser déposséder par des « représentants » qui sont hors de portée et deviennent indépendants des citoyens et citoyennes. En même temps, il faut penser que ces expérimentations locales ne sont pas statiques. Chaque avancée et chaque difficulté conduisent à vouloir dépasser des limites antérieures. Il ne s’agira donc pas ici d’une pétition de principe mais d’affronter le passage à l’acte.

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« Le problème ça allait être les militants » Au cœur du laboratoire grenoblois

Depuis 2009, Le Postillon, journal autogéré et 100 % local, est un organe de presse « critique » qui concentre ses investigations sur la métropole grenobloise. Son fondateur, Vincent Peyret, a écrit un livre très documenté sur la municipalité rouge et verte menée par le maire de la métropole Éric Piolle. Le vide à moitié vert, aux éditions Le monde à l’envers.  L’Union départementale Solidaires Isère s’est entretenue avec lui.

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Etat espagnol : les syndicalistes et les mairies du « changement »

Depuis un peu plus d’un an maintenant, Podemos est associé au PSOE pour gouverner l’État espagnol. Podemos a plusieurs ministres dont celui du Travail et de l’économie sociale. Depuis 2015, des forces de gauche dites alternatives gèrent des villes importantes, notamment en Catalogne. Qu’en disent nos camarades syndicalistes ? Eléments de réponse d’un camarade de la Confederación General del Trabajo de Catalunya (CGT Catalogne).

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Brésil : la CUT et le gouvernement Lula

Au pouvoir au Brésil depuis 2003, le Parti des travailleurs (PT) aurait tenté, dit-on, d’harmoniser les intérêts de la « société civile » et du patronat, dans l’optique de combiner la lutte contre les inégalités sociales à la croissance économique. D’un côté, il oscilla entre une réforme agraire timide, la création de certains programmes de soutien aux plus démuni-e-s et des gestes mitigés en faveur des demandes syndicales. De l’autre, il reprit des pans importants de l’agenda néolibéral instauré par son prédécesseur, l’ex-président Fernando Henrique Cardoso. Constitué autour d’une volonté indéniable de s’appuyer sur l’entreprise privée et la flexibilisation du travail afin de stimuler l’économie du pays, le Brésil du PT en a surpris plusieurs. L’obéissance aux règles dictées par les institutions financières internationales, à commencer par le Fonds monétaire international, a conduit certains observateurs à qualifier le Président Luiz Inacio « Lula » Da Silva et son bilan gouvernemental de « social-libéralisme ».

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Le syndicalisme soviétique a-t-il existé ?

Lors du centenaire de la révolution russe, de nombreuses publications ont vu le jour, profitant de la distance avec cet événement décisif du XXe siècle, pour s’intéresser à différents aspects de l’histoire soviétique. Le sujet syndical est malheureusement trop souvent délaissé dans ces études. Pourtant, le syndicalisme, en Union soviétique et dans les pays placés directement sous son influence, a tenu rang de modèle pour plusieurs générations militantes partout dans le monde.

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Relations entre partis et syndicats : construire quelques garde-fous

La question du rapport avec les partis politiques est récurrente dans le mouvement syndical, avec, en toile de fond, la crainte d’une instrumentalisation des syndicats par les partis, dont ils seraient le prolongement, comme l’a été longtemps la CGT pour le PCF ou « des relations d’étreinte mortelle entre le mouvement syndical et le mitterrandisme », comme l’écrit Solidaires. Les risques sont donc identifiés : l’entrisme, l’affiliation, l’inféodation, les conflits d’intérêt, l’influence liée au manque de diversité, des conflits internes…

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La motion d’Amiens et le congrès SUD-Rail

En 2006, la fédération des syndicats SUD-Rail tenait son quatrième congrès fédéral. Quel rapport avec la charte d’Amiens ? Par hasard (oui, désolé pour les historiens et historiennes qui pourraient plus tard s’interroger sur la coïncidence des dates), il se trouve que ce congrès a eu lieu à compter du 16 octobre. Donc, cent ans, jour pour jour, après la séance de clôture du congrès d’Amiens de la Confédération générale du travail, le congrès de la Charte d’Amiens. 16 octobre 1906 – 16 octobre 2006, l’occasion était belle de montrer comment, modestement, le syndicalisme SUD-Rail se voulait dans la continuité des signataires de la motion de 1906. Cela se traduisit par la réédition en fac-similé du compte-rendu du 9ème congrès de la CGT, précédé de six textes plus contemporains : une analyse de la charte par l’historien Gilles Morin ; une texte de Georges Séguy, ex-secrétaire général de la CGT, « 1906, la CGT adopte la Charte d’Amiens » ; un document de FO, « 1906, la Charte d’Amiens : le mouvement syndical conquiert sa maturité » ; une publication de la FGAAC, « A propos de la Charte d’Amiens » ; une communication de Thierry Renard « 100 ans après la Charte d’Amiens : la notion d’indépendance syndicale face à la transformation des pouvoirs » ; l’appel pour l’autonomie du mouvement social ».

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Critique de l’économie politique et activité syndicale

Envisagé par son auteur comme « le plus redoutable missile qui ait jamais été envoyé à la tête des bourgeois » le Capital est pourtant, bien plus que ses autres textes, resté dans l’ombre des marxismes populaires et de parti. Véritable flop éditorial historique, seuls quelques groupes d’ouvriers isolés s’en saisissent dès sa parution pour constituer des cercles de lecture, tant l’ouvrage semble difficile et érudit. On se passera rapidement de sa lecture pour lui préférer des livres de « vulgarisation », comme le célèbre Abrégé du Capital de Cafiero qui, bien qu’approuvé par l’auteur rhénan, comporte de profondes lacunes. S’ensuivra l’avènement du marxisme de parti dont l’orthodoxie se passe de tout rapport sérieux et précis à Marx, et en particulier au Capital.

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La crise sanitaire, une respiration salutaire ?

Crise de la valeur travail. La crise sanitaire a fait de gros dégâts. Là où on ne les attendait pas. La corona, selon Jean-Luc Porquet « a véritablement ébranlé et annihilé la valeur travail ». Porquet, c’est dans le Canard enchaîné ; dans le Monde, Léa Iribanegaray nous fait rencontrer des « frugalistes » calculateurs qui, de très près, surveillent leur RIB (Revenu induit par ses besoins). Le boulot, juste ce qu’il faut… « A-t-on perdu tout sens de l’effort ? » s’interrogent deux auteurs bretons, Gérard Amicel et Amine Bourkerche, qui dans L’autopsie de la valeur travail, dissèquent l’idéologie du boulot. Un allemand, Robert Kurz s’en prend lui, à « l’ethos du travail ». Les éléments de la critique s’accumulent. Procès à charge ? Mais, est-ce sérieux cette iconoclaste critique ? Allons voir.

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Actualité de Pierre Bourdieu

Pierre Bourdieu est décédé le 23 janvier 2002 à l’âge de 71 ans. 20 ans plus tard, quelle actualité de Bourdieu – plus précisément de sa production intellectuelle en tant que sociologue – et donc quelle efficacité réelle d’une sociologie critique comme outil au service d’une stratégie politique d’émancipation, du rapport entre science sociale et pratique sociale du politique ?

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Prisons : un état des lieux

Surpopulation, insalubrité, vétusté, absence d’intimité, hygiène défaillante, défaut de prise en charge, accès aux soins limité : les conditions de détention dans nombre de prisons françaises ont souvent été condamnées par les tribunaux et pointées du doigt comme « une humiliation pour la République ». Pourtant, les choix de politique pénale continuent d’entraîner l’incarcération d’un nombre toujours plus important de personnes, concourant à leur aggravation. Tour d’horizon non exhaustif.

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En prison comme ailleurs, le droit du travail doit s’appliquer !

Le travail en prison, comme dans le reste de la société, est à la fois une contrainte puisqu’il se réalise dans un rapport d’exploitation capitaliste mais demeure une chance d’avoir un emploi et un revenu qui va avec. En détention, le travail n’est théoriquement plus obligatoire depuis 1987 mais reste sous-payé, sans droits, avec des emplois très peu qualifiées et des tâches répétitives. Environ 20 000 personnes travaillent en prison sur les 70 000 détenu∙es, un chiffre qui n’a cessé de baisser au fil des années depuis plus de 20 ans. La première cause est simplement, comme dans la société « hors les murs », une baisse du nombre d’offres d’emplois ce qui en fait presque un luxe en prison.

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La liberté est dans mon cœur

Le mardi 27 octobre 20201 au Centre de détention de Muret (Toulouse) 29 prisonniers se révoltent. Ils refusent de réintégrer les cellules et bloquent la promenade pendant 5 heures à la suite de l’annonce de la fermeture des parloirs famille et les unités de vie familiales ainsi que la mise en place d’un protocole sanitaire de plus sur le linge. Ils exigent de ne plus avoir de séparations lors des parloirs, que soit levée l’interdiction de contact avec les proches et que de nouveau les colis de linge et ceux de Noël soit autorisés … Les ÉRIS (Equipes régionales d’intervention et de sécurité) interviennent, plusieurs mutins sont placés au mitard et transférés. Crève la taule !

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Abolitionnisme : entretien avec Gwenola Ricordeau

Au tournant des années 1970-80 s’est formée la première vague de l’abolitionnisme pénal. Elle a profondément renouvelé le champ de la criminologie critique et les réflexions sur le crime, la peine et la prison. Gwenola Ricordeau fait découvrir ce courant de pensée qui inspire aujourd’hui les mouvements pour l’abolition de la police et de la prison, mais invite aussi à repenser la peine et le statut de victime.

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Le Groupe Information sur les Prisons

Le Groupe Information sur les Prisons (GIP) a été fondé en 1971. Le manifeste initial est signé par Michel Foucault, Jean-Marie Domenach et Pierre Vidal-Naquet. D’autres philosophes, écrivain·es, historien·es s’impliqueront, à l’image de Daniel Defert, Gilles Deleuze, Michelle Perrot ou Danielle Rancière. Durant (seulement !) deux ans, le GIP rassemblera aussi des magistrat·es, des avocat·es, travailleurs et travailleuses sociaux, des médecins, des journalistes, des détenu·es et ex-détenu·es, des proches de détenu·es. Le GIP s’attache à donner la parole aux prisonniers dits « de droit commun » ; questionnaires et cahiers de revendications forment le socle des 5 brochures publiées en 1971 et 1972.

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Mobilisations de prisonnier·es, stratégie syndicale – Entretien avec Joël Charbit

Dans les années 1970/1980, plusieurs organisations de prisonnier·es à travers le monde adoptent une forme syndicale. Ici, cela se traduire par la naissance de l’Association syndicale des prisonniers de France. Joël Charbit dresse ici un panorama de ces expériences, non sans rappeler les connexions avec les combats antiracistes et féministes, notamment.

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Commune de Paris : quelle justice en Révolution ?

Aborder la situation de la justice et des prisons au cours des 72 jours de la Commune, ce n’est pas analyser l’application d’un programme réfléchi, une succession de décisions cohérentes. C’est essayer de suivre les débats, les décisions multiples, parfois contradictoires, prises au coup par coup, en réaction aux problèmes rencontrés, sous les pressions de diverses exigences liées aux situations exceptionnelles, de différents courants politiques, alors que les combats avec Versailles font rage dès les premiers jours d’avril. Il s’agit plus d’un regard sur l’élaboration d’une politique émancipatrice au cours d’un processus révolutionnaire, avec tous ses soubresauts, ses conflits.

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Georges Ibrahim Abdallah, vers la perpétuité réelle en France

Les lignes qui suivent sont construites autour de la mise en forme d’un entretien que nous avons eu au parloir de la prison de Lannemezan, fin août 2021 avec Georges Ibrahim Abdallah, détenu depuis 37 ans en France. Les notes prises lors de ces 3 heures d’échanges, parlent de ce que l’on peut dire, ce que l’on doit dire plutôt lorsque l’on est un militant révolutionnaire, car la prison n’est pas aménageable, elle est à l’image du capitalisme et doit être abolie. Les propos de Georges Ibrahim Abdallah sont précédés d’une courte présentation et suivis d’informations sur l’actualité de sa lutte, ainsi que d’un rappel d’une motion adoptée lors du -ème congrès national de l’Union syndicale Solidaires.

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Un des prisonniers politiques basques en France – Josu Urrutikoetxea

Josu Urrutikoetxea est une figure déterminante de la sortie du conflit au Pays basque. Dès les années 80, il travaille à la mise en place des discussions d’Alger, avant d’être, en pleine trêve, arrêté le 11 janvier 1989 à Bayonne, quelques jours seulement avant l’ouverture de ces premières tentatives de résolution des hostilités. Élu, à partir de 1998, à deux reprises, député au parlement basque, Josu Urrutikoetxea mène pour le mouvement basque les négociations de Genève de 2005 à 2007 et d’Oslo de 2011 à 2013. Enfin, c’est lui qui annonce, depuis le Centre Henry Dunant à Genève, l’autodissolution de l’organisation ETA le 3 mai 2018, après qu’a été proclamée la fin de la lutte armée, le 20 octobre 2011, et que les armes ont été rendues le 8 avril 2017 à Bayonne, posant ainsi les fondements inédits, de par leur caractère unilatéral, de la résolution du dernier et plus vieux conflit armé d’Europe occidentale.

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