Les quartiers populaires

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Gilets Jaunes de Rungis et Comité Adama

Les quartiers populaires reviennent constamment dans le débat autour des Gilets jaunes. Les articles se succèdent dans différents journaux et autres sites pour insister sur l’absence des quartiers populaires. Il y a comme une volonté d’occulter la présence pourtant bien réelle d’habitants des quartiers concentrés dans les grands centres urbains. L’image médiatique du mouvement des Gilets jaunes, est celle d’une France rurale, périphérique qui aurait surgit sur tout le territoire. Cette affirmation, en partie vraie, ne prend pas en compte la mobilisation importante dans les grandes villes de France comme Toulouse, Bordeaux ou Rouen.
Il y a une sorte de soulagement de la part d’une élite qui utilise tous les moyens médiatiques pour ne pas voir une implication massive des quartiers dans les Gilets jaunes. Comment imaginer qu’un tel mouvement puisse se faire sans les habitants des quartiers ? Nous sommes investis depuis plusieurs semaines dans le mouvement des Gilets jaunes, nous habitons les quartiers d’Ile-de-France.

Les Gilets jaunes de Rungis et le Comité Adama manifestent chaque samedi ensemble. Nous avons jugé qu’il était important de se réapproprier la parole sur nos vies et sur les luttes que nous menons. D’exprimer, dans le cadre d’un meeting, notre engament et nos motivations dans le mouvement des Gilets jaunes. Nous souhaitons réfléchir à la façon dont nous pouvons amplifier l’implication des habitants des quartiers populaires, qui vivent l’enclavement, la précarité, Le mal-logement, les violences policières et le racisme au quotidien. Ce qui est fait pour nous, sans nous, est fait contre nous !1

Ripostons à l’autoritarisme !

À l’initiative de : La vérité pour Adama, Justice Vérité Pour Wissam, Tous Migrants, Front de Mères, Union Syndicale Solidaires, Attac France (Officiel), Maison du Peuple de Saint-Nazaire et alentours, Désarmons-les, Assemblée des blessés, Confédération Paysanne, Réseau Sortir du nucléaire, des participant.es à la lutte de Bure, et d’autres… […]

Nous, organisations nationales, collectifs, habitants de quartiers populaires, de territoires en luttes, Gilets jaunes, personnes impliquées dans des luttes migratoires, sociales, écologistes, paysannes, anti-nucléaires, n’avons plus peur des mots : la répression féroce contre le mouvement des gilets jaunes n’est pas une bavure, elle incarne un système. 279 blessés graves, 22 éborgnés, 5 mains arrachées, 1 personne décédée. 8700 gardes à vue, 2000 procès, 1500 comparutions immédiates, 40 % de peines de prison ferme. Cette répression brutale était autrefois réservée aux quartiers populaires. Maintenant, nous entrons dans un autoritarisme qui se généralise à toute la société.

Nos libertés publiques sont en danger, sous le coup d’un arsenal de lois toujours plus liberticides. La nouvelle loi « anticasseurs » remet totalement en cause le droit de manifester. La séparation des pouvoirs vacille : l’autorité législative est dominée par une majorité parlementaire aux ordres. L’institution judiciaire est de plus en plus assignée à des fins de maintien de l’ordre. Le gouvernement cherche à asphyxier la contestation politique : quand la matraque ne suffit pas à disperser les foules, le marteau du juge prend le relais. La longueur des enquêtes et des procès gèle autant les luttes que le canon à eau.

À Bure, les opposants au mégaprojet d’enfouissement des déchets nucléaires ont essuyé en un an 60 procès, 28 interdictions de territoire et au moins 5 peines de prison ferme. 7 personnes sont mises en examen pour “association de malfaiteurs”, placées sous contrôles judiciaires et interdites de rentrer en contact. À Briançon, parmi les 13 personnes poursuivies pour, notamment, « l’aide à l’entrée d’étrangers en situation irrégulière », 9 sont condamnées à des peines de prison dont 2 à 4 mois ferme. À Beaumont-sur-Oise, la famille d’Adama Traoré attend toujours que la cause réelle du décès de leur frère soit reconnue. Pendant ce temps ses quatre frères sont emprisonnés et plusieurs personnes sont ciblées par des contrôles judiciaires. À Clermont-Ferrand, un rassemblement de soutien à Wissam el-Yamni, tué par la police en 2012, est annulé par la préfecture après une mobilisation des syndicats policiers.

La liste peut continuer longtemps. Des gilets jaunes écopent de 6 mois de prison ferme pour avoir diffusé des appels à bloquer des raffineries sur Facebook, des élèves du lycée Arago sont fichés S, Médiapart a failli être perquisitionné, des paysans opposés à la ferme des Millevaches sont condamnés à payer 120 000 euros de dommages et intérêt, des syndiqués sont licenciés ou mis en examen pour leur activités, les militants de Greenpeace prennent de la prison ferme pour la première fois depuis la création de l’association en France, les adhérents d’ANV COP21 enchaînent les gardes à vue et les perquisitions, de jeunes grévistes lycéens pour le climat sont placés en garde-à-vue parce qu’ils détiennent 3 kg de farine bio. Aucun foyer de contestation n’est épargné. Ces éléments s’additionnent et font système, nous donnent à voir ces “matins bruns” qui pointent à l’horizon.

Face à l’autoritarisme, nous appelons à faire corps et renforcer nos solidarités. Nous refusons de jouer le jeu de la division entretenu par un climat de guerre intérieure où des « intellectuels » vont jusqu’à appeler les policiers à se servir de leurs armes. Nous ne voulons plus laisser personne derrière, isolé.e face à la répression policière et judiciaire.

Il existe aujourd’hui en France des centaines de prisonniers politiques, de condamnés, de « délinquants » dont le seul crime est de lutter pour le droit à vivre dans la dignité, parce qu’ils ne s’en sortent plus, parce qu’ils veulent défendre des territoires. Condamnés, parce qu’ils luttent contre un système inégalitaire qui détruit les existences et ravage le vivant au nom du profit et du pouvoir. Condamnés, parce qu’ils ne sont pas nés avec la bonne couleur de peau ou le bon patronyme. Nous en exigeons l’amnistie, tout comme l’abandon du LBD 40 et des grenades offensives !

Pour faire barrage à ce régime liberticide, nous appelons à la constitution d’un large front commun contre l’autoritarisme et la criminalisation de la contestation, une alliance inédite de luttes de base et d’organisations plus larges. Ceci pour :

  • Mettre en lumière les cas de violences judiciaires, qui se vivent à huis clos
  • Fédérer les organisations, collectifs, personnes ciblées par la criminalisation, mieux nous connaître pour renforcer nos solidarités.
  • Affirmer notre résistance commune2.

1 Suivait l’appel à la réunion du 17 février 2019.

2 L’appel se termine par l’invitation à la rencontre du 11 mai 2019.

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